Homélie du Père Guy de Lachaux pour le 2e dimanche de Carême 2021
Prendre soin de ma relation à Dieu
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Le deuxième « prendre soin » qu’on nous propose pour notre carême, c’est « prendre soin de notre relation à Dieu ». C’est une porte d’entrée très importante… mais aussi très complexe. Déjà dimanche dernier, notre carême avait commencé sur un sujet explosif : « Prendre soin de la maison commune » … car il ne s’agissait pas simplement de s’extasier devant la création, même si, pour une part, elle nous situe devant l’extraordinaire et nous invite à la contemplation, mais il s’agissait surtout de nous situer face à ce qui se passe aujourd’hui : sous prétexte de développement, nous sommes devant un pillage des ressources de la terre et une destruction de notre monde. Alors, face à cela, le Christ nous invite à une prise de conscience radicale, à un retournement de notre manière de penser et de vivre à travers cette phrase bien connue du début de l’évangile : « Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle ». C’est le cri lancé par le Pape François à travers l’encyclique Laudato si.
Et voilà qu’aujourd’hui, nous avançons dans notre Carême en nous laissant interroger sur l’importance de prendre soin de notre relation à Dieu.
Ce n’est un scoop pour personne d’affirmer que ce qui est le plus complexe dans notre vie, mais en même temps le plus important, c’est notre relation avec les autres… et avec nous-même. Il doit en être de même sans doute dans notre relation à Dieu… et même peut-être est-ce plus difficile !
Regardons d’abord ce qu’il y a sous le mot « relation ». Nous disions que c’est ce qu’il y a de plus important dans notre vie. Ces relations se vivent d’un tas de manières. Elle se disent par un regard (par exemple avec Zachée), par le toucher (par exemple avec l’aveugle), par la parole (par exemple avec le paralytique), ou encore par la présence tout simplement.
La famille, par exemple, est le lieu par excellence de la relation, et même de la relation intime… mais aussi celui de la plus grande solitude. Prendre soin de nos relations dans ce cadre est un travail de chaque jour. Car la relation, c’est quelque chose de vivant… c’est une marche sans fin. C’est une attention toujours renouvelée. C’est un partage de chaque jour, c’est une attente patiente. Ce sont des gestes posés, un désir de comprendre comme Marie qui, nous dit-on, « gardait toutes ces choses dans son cœur ». C’est une mémoire des événements qui jalonnent la vie. C’est un respect, c’est un pardon quelquefois. Oui, c’est une marche continuelle. Et si on en vient à s’arrêter, la relation s’engourdit et meurt ! Hier, j’ai rencontré un homme qui, après 25 ans de mariage, venait partager sa souffrance : sa femme venait de lui dire : « je pars. Tout est mort entre nous ! »
Si la relation avec nos proches est cette marche continuelle sans laquelle on peut se réveiller un jour sur un ensemble vide, combien est-ce plus vrai encore dans notre relation à Dieu !
Pour percevoir la façon dont nous pouvons prendre soin de notre relation à Dieu, je vous propose de suivre pas à pas le témoignage d’une chrétienne ordinaire. Elle s’appelle Huguette.
Comme beaucoup d’entre nous, elle a grandi dans le bain chrétien. Comme elle le dit dans son témoignage : « Je croyais en Dieu, le Père Tout Puissant, créateur du ciel et de la terre, mais je ne connaissais pas mon créateur, et je ne ressentais pas sa présence dans ma vie. » Les premiers temps de la relation à Dieu sont donc encore très extérieurs à nous-même et très dépendante de ceux qui nous mettent sur ce chemin. Il suffit alors d’un éloignement pour que tout cela s’engourdisse. C’est ce qui s’est passé pour Huguette. Envoyée pour ses études à l’étranger, ce début de relation s’est évanoui. C’est la découverte de la liberté… mais qui rapidement ouvre à une vie très superficielle. C’est alors la sensation d’un vide intérieur qui lui a fait se souvenir des moments vécus en famille. Elle a alors tenté de reprendre la route. Elle est retournée à la messe. Rapidement ce fut la déception. Elle a donc pensée que c’était l’église catholique qui était trop statique et a fréquenté une église évangélique… mais même là Dieu lui restait extérieur.
Alors, dit-elle, c’est là que je me suis mise à chercher ! Ce tournant est essentiel. Elle a conscience qu’il faut chercher pour trouver…
Elle retourne à la messe, elle se met à lire régulièrement l’évangile… mais il fallait encore aller plus loin car tout cela était une démarche très intellectuelle. C’est là qu’elle s’est mise à prier… « J’ai fini par demander au Seigneur d’ouvrir mon cœur à la Parole. Plusieurs fois, avec insistance, j’ai supplié le Seigneur… »
Tout ce temps, c’est le temps où les fausses idées sur Dieu peuvent tomber les unes après les autres. C’est ce qui se passe dans l’histoire du peuple de Dieu. Regardez, dans la première lecture, Abraham découvre que Dieu ne veut pas qu’il sacrifie son premier né. Car Dieu n’est pas un Dieu pervers, mais un Dieu qui aime l’homme et qui lui est fidèle dans son alliance. Et c’est ce qui se passe aussi pour Paul qui, dans l’épître aux Romains, exprime sa découverte que le jugement de Dieu n’est pas pour condamner, mais pour nous sauver. Et c’est pourquoi il s’écrie : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ! » C’est ce qui se passe pour chacun d’entre nous dans notre quête de Dieu… car il nous faut avoir une image vraie de Dieu pour pouvoir le rencontrer… C’est donc un long chemin sur lequel nous ne sommes pas maîtres de ce qui se passe, et surtout du moment où la relation pourra se vivre. C’est Dieu qui, quand il le juge possible, se rend présent avec son vrai visage.
Et c’est ce qui s’est passé pour Huguette qui, un jour, dans le RER, alors qu’elle était en train de prier dans son cœur, elle a fait comme elle le dit « l’expérience de Dieu ». Elle a senti la douceur et l’amour de Dieu se poser sur elle, et elle a ressenti une grande paix intérieure. C’est sans doute ce qu’ont vécu les trois apôtres de l’évangile d’aujourd’hui que Jésus avait emmené avec Lui sur la montagne. Ils ont fait l’expérience de la rencontre de Jésus avec son vrai visage. Ils ont perçu cette voix qui leur disait : « Celui-ci est mon Fils Bien-Aimé. Ecoutez-le » Et soudain, continue l’évangile, regardant autour d’eux, ils ne virent plus que Jésus, seul avec eux. »
Car il faut toujours reprendre le chemin. La relation est à ce prix !
Et voilà qu’Huguette a été amenée à accompagner ses enfants au catéchisme. Elle avoue avoir découvert avec eux le Notre Père, non comme une suite de formules, mais comme une aventure qui l’ouvrait à cette découverte qu’elle était enfant de Dieu.
En conclusion elle affirme deux choses essentielles pour continuer à s’ouvrir à cette relation :
La première, c’est qu’elle est consciente que cette flamme est fragile, comme toute relation, et qu’il faut continuer chaque jour à en scruter la présence dans les mille rencontres de la vie.
Et la deuxième, c’et cette certitude qu’elle n’en est qu’au B.A.BA de cette rencontre et qu’elle ne peut que s’ouvrir à la possibilité pour Dieu de se révéler à elle.
Alors, nous aussi, prenons soin de marcher jour après jour sur le chemin de la relation à Dieu !
Pour accéder au témoignage d’Huguette, allez sur la chaine YouTube de la paroisse avec ce lien à partir de jeudi 4 mars.
Père Guy de Lachaux