Homélie du Père Guy de Lachaux pour le 1er dimanche de Carême 2020
Baptisés, un chemin pour grandir
1er Dimanche de Carême A : Evangile selon Saint Matthieu 4, 1-11
Déjà avant Noël, nous avons commencé à réfléchir sur ce thème et nous nous sommes dit que nous étions invités à nous laisser habiter par le Christ. Aujourd’hui, nous allons essayer d’aller plus loin … et de voir quel est le sens profond de cet événement que, le plus souvent, d’autres ont posé dans notre vie … mais que nous avons petit à petit assumé à notre profession de foi, à notre confirmation et au cours de notre vie d’adulte...
Aujourd’hui, on nous présente Jésus tenté au désert. C’est bizarre, car cela se situe juste après son baptême par Jean-Baptiste. Serait-ce cela la conséquence du baptême : l’entrée dans une crise du sens de notre vie … comme Jésus ?
Pourtant, pour ceux qui viennent demander le baptême pour leur enfant, l’entrée dans la foi, c’est plutôt une consolation, une tranquillité de l’âme : « comme vous avez de la chance d’avoir la foi », « vous êtes sûrs ! vous n’avez pas à vous poser de questions » … Et si on demande le baptême pour notre enfant, c’est d’abord pour qu’il soit protégé, qu’il ait une vie sans problèmes.
Eh bien, il faut que ce soit bien clair, mon expérience ne m’emmène pas sur ce chemin.
Être baptisés, en fait, c’est rentrer dans un combat. Les hébreux, quand ils se sont enfuis d’Egypte et qu’ils ont passé la Mer rouge, c’était parce qu’ils en avaient assez d’être esclaves. Ils voulaient être libres. Mais quand ils se sont retrouvés de l’autre côté de la Mer Rouge, ils ont commencé à râler : on n’a pas d’eau, on n’a pas à manger … et de rêver de retourner sur leur lieu d’esclavage. Il leur a fallu 40 années pour accepter de rentrer dans le combat de la liberté. La liberté ne s’apporte pas sur un plateau, elle se découvre, elle se conquiert …
Ainsi en est-il du baptême. Il n’est pas l’entrée dans une tranquillité béate, mais dans un combat pour nous ouvrir à notre véritable liberté. Nous n’avons pas trop de ces 40 années symboliques, c’est-à-dire de toute notre vie, pour nous laisser « revêtir par le Christ ».
Comme Jésus au désert, nous sommes devant des choix fondamentaux qui concernent le quotidien de notre vie : ce que nous mangeons, nos relations avec les autres, notre désir de puissance, notre tentation d’amasser des biens, etc. C’est de cela qu’il s’agit dans les tentations de Jésus. Et c’est donc tout cela, en fin de compte qui a besoin d’être bien orienté dans nos vies, car sinon en croyant choisir la vie, la liberté, le bonheur, c’est la mort, l’esclavage, le malheur qui s’en dégagent.
Nous sommes donc invités à un travail de discernement. Au cœur de tout ce que je vis, dans mon quotidien, qu’est-ce qui mène vraiment vers la liberté, la vie ? Face à cette question, les avis sont multiples et vont d’un bord à l’autre des choix à faire.
Le Pape François, dans son exhortation « La joie de l’amour » nous en donne le chemin.
- Il nous invite d’abord à avoir un rapport quotidien et vivant avec la Parole de Dieu … non pas simplement une parole écoutée distraitement le dimanche. Mais un lien vivant avec elle.
- Il nous invite ensuite à regarder les conditions de vie dans lesquelles nous sommes, les répercussions de nos choix sur la vie des autres et le bien commun.
- Il nous invite enfin à écouter la parole de l’Eglise qui face aux événements du monde, aux choix de la société, émet une parole.
Et c’est dans la confrontation priante de ces 3 dimensions que s’opère le discernement, c’est-à-dire ce que je perçois de l’appel de Dieu pour ma vie d’aujourd’hui.
Cela peut se faire seul, ou accompagné, non pas dirigé mais accompagné … car cela me permet de prendre du recul face à moi-même.
En conclusion, ce combat dans lequel le Christ est rentré suite à son baptême, c’est aussi le nôtre. Nous sommes invités à y rentrer avec courage, car, sachons-le, c’est Dieu qui en nous, nous permettra de faire les choix nécessaires qui pourront nous paraître hors de notre portée. Gardons en nous cette phrase de Jésus « Ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu » (Luc 18, 27). C’est pourquoi il peut nous dire cette parole lue dimanche dernier « Vous donc vous serez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Matthieu 5, 48).
Père Guy de Lachaux