Homélie du Père Guy de Lachaux pour le dimanche 5 juillet 2020
Appel à trouver le repos
à partir de l'évangile de Saint Matthieu (11, 25-30)
L'homélie est disponible en versions audio et texte...
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En ce début de vacances, cet appel de l’évangile à trouver le repos résonne bien. Oui, nous avons besoin de repos. L’année a été dure : les rebondissements politiques et sociaux avec la crise des gilets jaunes et les grèves, et puis le confinement… et cette angoisse face à un ennemi invisible. Nous sommes passés de la suractivité à l’enfermement. Tout cela a usé lentement nos dynamismes. Nous avons besoin de repos ! Nous avons besoin de prendre du recul. Nous avons besoin de comprendre à nouveau qui nous sommes…
D’ailleurs Jésus lui-même a été très soucieux de procurer des temps de repos à ses disciples. En Marc 6/31, les disciples reviennent de mission. Ils rendent compte à Jésus de ce qui s’est passé, et Jésus leur dit : « Venez à l’écart, dans un lieu désert, et reposez-vous un peu ! » Ils avaient besoin de repos, de se retirer dans un lieu tranquille pour refaire leurs forces.
C’est ce qui nous arrive à nous aussi. Tout au long de l’année, chacun à notre place, nous avons accompli notre mission : dans notre famille, dans notre vie professionnelle, dans nos engagements, dans notre Eglise. Et aujourd’hui, en fin d’année, nous faisons le bilan et Jésus nous dit comme à ses disciples : « Venez à l’écart, et reposez-vous un peu ! ». Là aussi, il a le souci de ses disciples que nous sommes, de notre équilibre humain… le repos étant ce qui nous permet de reprendre ensuite notre activité, mais avec des énergies nouvelles, avec un sens renouvelé de notre vie.
Mais ici, dans cette page d’évangile, cela va beaucoup plus loin. Car on sait bien que quand on est non seulement fatigué, mais vidé comme on dit, c’est autre chose en nous qui est atteint : c’est ce ressort qui, quand il est détendu, fait que la vie n’a plus de consistance, n’a plus d’intérêt, n’a plus de sens… Et c’est précisément à ce niveau-là que Jésus nous interpelle aujourd’hui. Il ne nous propose pas un Club Med amélioré, mais de trouver le repos de notre âme. Il s’adresse donc à ceux qui sont atteints jusqu’à l‘âme, c’est-à-dire ce lieu qui est au plus intime de nous-même, et où il nous dit qu’il réside lui-même… si nous lui ouvrons la porte.
En fait, quand il dit : « Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau », c’est de cela qu’il s’agit. Ce fardeau trop lourd et qui fait peiner, c’est souvent ce que l’on appelle l’angoisse, ou encore la culpabilité, ou encore le non-sens… et on sait que c’est un fléau terrible qui détruit lentement, de l’intérieur. Et alors on perd l’estime de soi… et on a une vie sans ressort. C’est l’âme qui est atteinte.
Dans sa première lettre, Saint Jean (1 Jean 3/20) nous dit : « Si notre cœur nous accuse, Dieu Lui est plus grand que notre cœur, et il discerne tout. » c’est-à-dire qu’il nous invite dans ces moments-là à oser nous laisser habiter par son regard, par sa présence qui est, comme le dit le Pape François dans son exhortation sur l’amour, plein d’un « amour inconditionnel, immérité et gratuit » !
C’est cela la libération du fardeau. Ce n’est pas « il faut faire ceci » ou « il faut faire cela », mais c’est « laisse-toi habiter par la présence de Celui qui est au cœur de ta vie, car son regard fait d’amour et de miséricorde, te remettra debout ».
J’ai cité le fardeau de la culpabilité, mais j’aurais pu citer aussi celui de la solitude, ou celui du burn-out au travail, ou encore la terrible épreuve du harcèlement, les crises familiales, la dépression ou la maladie. Tout cela atteint l’âme.
Et c’est à ceux-là que le Christ s’adresse en disant : « Vous portez un poids insoutenable, venez à moi et prenez sur vous mon joug. En même temps que vous faites ce qu’il faut humainement parlant pour en sortir, laissez-moi entrez dans la course… et mettez-vous avec moi sous mon joug, car il est léger… et il vous donnera le repos pour votre âme ! »
D’ailleurs nous savons ce que c’est qu’un joug : c’est une pièce de bois qui attache deux animaux pour qu’ils tirent ensemble une charrue ou une charrette. Eh bien, se lier au Christ par un joug, c’est bénéficier de sa force. Pour sûr qu’avec lui, le fardeau doit être bien plus léger, car c’est lui qui tire tout !
Alors, ne nous y trompons pas. Nous avons besoin de repos. A une plus ou moins grande profondeur, nous avons été atteints jusqu’à l’âme et le ressort profond de notre être a été atteint. Ce repos n’est pas simplement de pouvoir dormir ou nous détendre… il est aussi de ressourcer notre être au niveau de l’âme. Prenons donc le temps de nous laisser atteindre à cette profondeur : un livre, une retraite, un temps de prière plus gratuit… que sais-je encore !... sans oublier une attention au frère ! Amen
Père Guy de Lachaux